Ce lundi Pierre Adam a invité la population, touchée par l’attentat terroriste d’Arras et l’assassinat de Dominique Bernard enseignant dans un collège de cette ville, à se rassembler sur le parvis de la mairie.
Lors de son élocution il a notamment fait un rappel des attentats qui ont été perpétrés ces 10 dernières années sur le territoire français avant de demander une minute de silence.
Janine Troadec, adjointe, est intervenue en faisant la lecture d’un texte d’Anne Roumanoff sur la vie des profs, d’un prof, de Dominique Bernard…. La justesse des paroles nous invite à vous le partager… (ci-dessous)
On comptait près d’une dizaine d’enseignants notamment des retraités parmi la vingtaine de personnes présentes au rassemblement ….
Lecture par Janine Troadec, adjointe, enseignante en retraite, d’un texte écrit par Anne Roumanoff, hommage bouleversant, suite à l’attentat d’Arras et au meurtre de Dominique Bernard enseignant.
Une vie à retourner à l’école chaque jour, à enseigner, à tenter de se faire respecter.
Une vie à corriger des copies le soir, le week-end,
à annoter à l’encre rouge ou bleue turquoise « Peut mieux faire …»,
à encourager « Des nets progrès, continuez ! »,
à déceler les potentiels timides « Prenez confiance ! » avec des points d’exclamation pour donner un peu de poids à ses mots.
Une vie passée à lire encore et toujours, à chercher des nouvelles façons de les intéresser.
Allumer la lumière dans les yeux éteints.
Lutter contre les écrans qui les happent, contre les réseaux qui schématisent, leur apprendre à penser par eux-mêmes.
Les encourager à poser leurs questions maladroites, ne jamais se moquer.
Une vie à les regarder s’endormir en cours et à tenter de les réveiller.
Espérer arriver à les éveiller.
Une vie à répéter des consignes,
à organiser des réunions parents-profs,
à convoquer les élèves qui perdent pied,
à recevoir les parents jamais contents.
Une vie à subir les changements de ministres, de programmes, de consignes et de directeurs, à s’adapter en râlant… juste un peu.
Une vie à être découragé souvent, agréablement surpris parfois. La sensation de répéter toujours la même chose. Se demander parfois pourquoi…
Une vie à tenter de garder l’enthousiasme,
à tout faire pour ne pas devenir un prof aigri et blasé.
Continuer d’y croire.
Prendre du plaisir à transmettre.
Une vie à écouter des exposés maladroits ânonnés par des voix qui muent,
à supporter les « euh, donc, voilà”,
à répéter “pas de portable en cours”.
Donner des petits cours pour arrondir les fins de mois, dire « avec mon petit salaire de prof, je ne peux pas me le permettre ». Calculer chaque dépense mais se donner sans compter.
Expliquer, répéter, écouter, parler, lire, écrire, être fatigué .
La fête de fin d’année. Tant de fêtes de fins d’années, tous ces élèves croisés, tous ces collègues enseignants.
Le café qu’on partage à la va-vite pour se donner du courage avant d’aller les affronter. …
Des remerciements, parfois des années plus tard, quand on croise un ancien élève au marché, « Vous avez été important pour moi, Monsieur vous savez » , quelques mots murmurés comme dans un souffle et l’homme s’éloigne un peu gêné avec sa femme et la poussette du petit.
Les petits mots à la fin de l’année griffonnés sur un bout de papier qu’ils ont écrit à plusieurs,
le cadeau collectif, un livre qu’on a déjà lu, souvent!
Remercier, se dire que tout cela n’est pas vain. Que ça valait le coup de se fatiguer comme ça.
Juste envie de pleurer quand je regarde la photo de ce professeur.
Au revoir monsieur Dominique Bernard.
Anne Roumanoff, humoriste
dimanche 15 octobre 2023 : Ce lundi la population de Trévou est invitée à se réunir quelques instants sur le parvis de la mairie en soutien aux familles, aux proches, des victimes d’Arras.. RV à 11h45
Cette attaque, perpétrée par un ancien étudiant du lycée fiché S, a entraîné le décès du professeur, qui s’était interposé entre son assaillant et d’autres élèves pris initialement pour cible.
Message de l’association des maires de France. :